Ca y est ! Kinotayo, le festival du cinéma japonais contemporain, redémarre et fête en même temps ses 10 ans ! La cérémonie d’ouverture a eu lieu hier comme l’année dernière au Gaumont Opera Premier dans une belle salle vraiment pleine à craquer. La fête aurait pu être encore plus belle si Mamomru Hosoda n’avait pas annulé sa présence au dernier moment suite aux attentats de Paris. Car cette année, pour ses 10 ans, Kinotayo a mis le paquet en terme de Guests et propose pour CHAQUE film en compétition, lors de sa diffusion au Gaumont Opera, la présence du réalisateur, de l’acteur, du producteur ou du scénariste du film en question. Ceci est très intéressant pour le public mais va surement, malheureusement, reléguer la MCJP au second rôle dans ce festival car d’ailleurs cette année même la cérémonie de clôture se déroule au Gaumont Opera…

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Le Garcon et la Bete_dir_Mamoru HosodaLa cérémonie d’ouverture a quant à elle été un succès avec un film de poids : Le Garçon et la Bête (バケモノの子, Bakemono no ko). Belle coïncidence lorsque l’année dernière nous commencions Kinotayo avec The Kingdom of Dreams and Madness, le documentaire qui annonçait le début de la fin du studio Ghibli et cette année nous commençons par le plus grand chef d’oeuvre de celui qui est véritablement annoncé comme le successeur légitime de Hayao Miyazaki : Mamoru Hosoda ! Le monsieur ne se précipite pas et prends son temps pour chacun de ses films mais on peut dire que ses 3 derniers en date ont marqué les esprits, le public et la critique. Après Summer Wars, et Les Enfants loups, Ame et Yuki qui ont fait un beau carton sur notre territoire il débarque avec Le Garçon et la Bête qui tentera la même prouesse lors de sa sortie française le 13 janvier prochain. La mission est d’ores et déjà réussi au Japon, où depuis sa sortie en juillet dernier, il a convaincu pas moins de 4 millions de spectateurs, ce qui en fait déjà le plus gros carton ever de la jeune carrière de Hosoda ! Succès mérité ? Que vaut vraiment Le Garçon et la Bête ?

Pour mieux m’immerger dans l’histoire et me laisser surprendre car les premières tournures scénaristiques je n’avais lu aucun synopsis et je pensais donc partir vers un récit purement imaginaire, une aventure épique et colorée lorsque le narrateur commence à nous introduire avec les traditionnels « Il était une fois, il y a bien longtemps, … » et à nous poser les bases du monde avec les mots clés Monstres, Seigneur, Divinité, Combat, … Mais finalement non. On replonge aussitôt dans la dure réalité de notre monde actuel, dans un Tokyo sombre et inhumain vu par notre tout jeune héros, Ren, qui, venant de perdre sa mère dans un accident, va préférer fuguer et vivre seul dans la rue plutôt que d’être confié à sa famille restante. Tokyo est sombre et sans vie car à ce moment là le coeur de Ren est rempli de noirceur et déteste le monde entier. Un thème très important dans le film, qui prendra tout son sens dans la seconde partie. Car dans la première moitié de Le Garçon et la Bête c’est une tout autre ambiance qui va s’installer grâce à la rencontre avec Kumatetsu. Notre héros va le suivre et trouver le passage secret vers le monde des Bêtes, Jutengai. Nous passons du Tokyo froid et sombre à un monde coloré, animé et chaleureux. Et même si Ren va chercher à s’enfuir de ce monde dans un premier temps c’est bien à Jutengai qu’il va vivre toute son enfance, grandir et se construire.

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La première partie se concentrera donc sur la très belle relation entre Ren et Kumatetsu, une espèce d’ours très habile au sabre qui a pour objectif de devenir le seigneur de Jutengai en battant son rival de toujours : le respecté et aimé Iozen. Et contrairement à ce dernier Kumatetsu, de par sa manière d’être, n’est parvenu à rassembler aucun disciple autour de lui… jusqu’à la venue de Ren. Va alors se développer une relation Maitre-Disciple, Père-Fils et tout simplement une belle histoire d’amitié entre un garçon et une bête. Malgré ces différences d’apparence leurs caractères sont assez semblables et ils vont très vite bien s’entendre bien que les « disputes » soient fréquentes tout au long du film. Mais ceci est très positif car cela va constituer la grosse partie comique du film, car oui on rigole ENORMEMENT devant Le Garçon et la Bête et on oublie presque les aspects dramatiques du début. L’entrainement de Ren m’a fait énormément pensé à The Karate Kid avec la dureté des entrainements et le parcours initiatique à travers le monde pour rencontrer certains spécialistes et acquérir force et sagesse. Mais à nouveau je vais être surpris par une tournure scénaristique alors que je pensais que le film allait se concentrer sur le duel Kumatetsu/Iozen et rester dans le monde Jutengai. J’avais tort.

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Ren, ou plutôt Kyûta (en référence à son âge au début du film – 9), tel qu’il est appelé par Kumatetsu, va grandir et devenir bientôt un jeune homme de 17 ans fort, mature et curieux. Il est maintenant totalement intégré dans Jutengai mais tout va se retrouver chamboulé lorsqu’il retrouve par hasard le passage vers le monde réel, un Tokyo qu’il n’avait plus vu depuis 8 ans. Il va notamment faire la connaissance de Kaede, une jeune fille de son âge qui va lui apprendre à lire et découvrir une autre vie, dans le monde des humains. Il va alors multiplier les aller/retours entre les deux mondes et bientôt des questions existentielles vont se poser à lui : qui est-il vraiment ? A quel monde appartient-il ? Au fur et à mesure de ses hésitations les ténèbres qui avaient envahit son coeur il y a 8 ans vont réapparaitre et cela constitue véritablement le coeur de la seconde partie du film. Tous les êtres humains, à contrario des bêtes, possèdent en eux cette part sombre qu’ils doivent maitriser, notamment grâce à l’amour. Dans cette seconde moitié de « Le Garçon et la Bête » la partie comédie a alors quasiment complètement disparue, laissant place aux larmes et au questionnement du genre humain. Une double lecture qui plaira alors aussi bien aux enfants qu’aux adultes. D’ailleurs si le film a fait 4 millions d’entrées au Japon c’est bien parce qu’il aura su séduire un public de 7 à 77 ans.

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Le dessin des personnages est assez simple mais beau et fera énormément penser (forcément) au précédent film de Hosoda « Les Enfants loups, Ame et Yuki », notamment en ce qui concerne Ren. On remarque d’ailleurs que Hosoda a mélangé 2 thèmes qui lui tiennent à coeur : la cohabitation entre les humains et les animaux (Les Enfants loups, Ame et Yuki) et le monde parallèle (Summer Wars). Et comme dans ces 2 autres films ce qui va exciter nos rétines c’est la beauté photo-réaliste des décors réels. Tokyo est plus vrai que nature : Shibuya, le métro, la scène finale près du Yoyogi National Gymnasium, … tout est reproduit à la perfection et tous ceux qui sont déjà allés au Japon s’amuseront à reconnaitre les ruelles et chaines de magasins célèbres de Tokyo.

Au final c’est évidemment un film que je recommande fortement. Je ne sais pas si c’est le meilleur Hosoda (j’ai également adoré « Les Enfants loups, Ame et Yuki » et « Summer Wars ») mais c’est un excellent film d’animation à voir entre adultes ou en famille avec ses enfants. La montée en puissance de Hosoda est en tout cas vraiment intéressante car elle arrive au moment où tout le monde pourrait être endeuillé avec la fin du studio Ghibli (pour les longs métrages tout du moins). Rendez-vous donc le 13 janvier en France !

PS : la petite mascotte blanche du héros, Chico, est vraiment trop mignonne <3